Ce qui s’est passé dans nos parlements de Pau et de Rennes, ne regarde pas mes autres parlements.
J’en ai usé, à l’égard de ces deux cours, comme il importait à mon autorité et je n’en dois compte à personne.
Je n’aurais pas d’autre réponse à faire à tant de remontrances qui m’ont été faites à ce sujet, si leur réunion, l’indécence du style, la témérité des principes les plus erronés, et l’affectation d’expressions nouvelles pour les caractériser ne manifestaient les conséquences pernicieuses de ce système d’unité que j’ai déjà proscrit, et qu’on voudrait établir en principe, en même temps qu’on ose le mettre en pratique.
Je ne souffrirai pas qu’il se forme, dans mon royaume une association qui ferait dégénérer en une association de résistance le lien naturel des mêmes devoirs et des obligations communes, ni qu’il s’introduise dans la monarchie un corps imaginaire qui ne pourrait qu’en troubler l’harmonie.
La magistrature ne forme point un corps ni un ordre séparé des trois ordres du royaume ; les magistrats sont mes officiers, chargés de m’acquitter du devoir vraiment royal de rendre la justice à mes sujets ; fonction qui les attache à ma personne, et qui les rendra toujours recommandables à mes yeux ; je connais l’importance de leurs services ; c’est donc une illusion qui ne tend qu’à ébranler la confiance que d’imaginer un projet formé d’anéantir la magistrature et de lui supposer des ennemis auprès du trône.
Ses seuls, ses vrais ennemis sont ceux qui, dans son propre sein, lui font tenir un langage opposé à ses principes, qui lui font dire :
– Que tous les parlements ne forment qu’un seul et même corps, distribué en plusieurs classes ;
– que ce corps nécessairement indivisible est de l’essence de la monarchie et qu’il lui sert de base,
– qu’il est le siège, le tribunal, l’organe de la nation ;
– qu’il est le protecteur et le dépositaire essentiel de sa liberté, de ses intérêts, de ses droits ;
– qu’il lui répond de ce dépôt et serait criminel envers elle s’il l’abandonnait ;
– qu’il est comptable de toutes les parties du bien public, non-seulement au roi, mais aussi à la nation ;
– qu’il est juge entre le roi et son peuple ;
– que, gardien du lien respectif, il maintient l’équilibre du gouvernement, en réprimant également l’excès de la liberté et l’abus du pouvoir ;
– que les parlements coopèrent avec la puissance souveraine dans l’établissement des lois ;
– qu’ils peuvent quelquefois par leur seul effort s’affranchir d’une loi enregistrée, et la regarder à juste titre comme non existante ;
– qu’ils doivent opposer une barrière insurmontable, aux décisions qu’ils attribuent à l’autorité arbitraire et qu’ils appellent des actes illégaux, ainsi qu’aux ordres qu’ils prétendent surpris,
– et que s’il en résulte un combat d’autorité, il est de leur devoir d’abandonner leurs fonctions et de se démettre de leurs offices, sans que leurs démissions puissent être reçues.
Entreprendre d’ériger en principes des nouveautés si pernicieuses, c’est faire injure à la magistrature, démentir son institution, trahir ses intérêts, et méconnaître les véritables lois fondamentales de l’État, comme s’il était permis d’oublier
– que c’est en ma personne seule que réside la puissance souveraine, dont le caractère propre est l’esprit de conseil, de justice et de raison ;
– que c’est de moi seul que mes cours tiennent leur existence et leur autorité ;
– que la plénitude de cette autorité qu’elles n’exercent qu’en mon nom demeure toujours en moi, et que l’usage n’en peut jamais être tourné contre moi ;
– que c’est à moi seul qu’appartient le pouvoir législatif, sans dépendance et sans partage ;
– que c’est par ma seule autorité les officiers de mes cours procèdent, non à la formation, mais à l’enregistrement, à la publication et à l’exécution de la loi, et qu’il leur est permis de me remontrer ce qui est du devoir de bons et fidèles conseillers ;
– que l’ordre public tout entier émane de moi : que j’en suis le gardien suprême ;
– que mon peuple n’est qu’un avec moi,
– et que les droits et les intérêts de la nation, dont on ose faire un corps séparé du monarque, sont nécessairement unis avec les miens, et ne reposent qu’en “ mes mains. â€
[…] Enfin, ce spectacle scandaleux d’une contradiction rivale de ma puissance souveraine me réduirait à la triste nécessité d’employer tout le pouvoir que j’ai reçu de Dieu, pour préserver mes peuples des suites funestes de telles entreprises.
Enviado por Enrique Ibañes